Devenir femme et son premier chum

La famille ou son petit copain?

Cindy a quitté son Angleterre natale pour le Canada sans se retourner. En s’établissant au Québec, la jeune femme fermait le livre d’une enfance difficile. Une famille violente et sans amour, une ville terne et dure et une vie de souffre-douleur.

Dominic Desmarais | Dossiers Famille, Développement personnel

Le passage du primaire au secondaire devait être une bouffée d’air frais pour Cindy. Un nouvel environnement scolaire, un nouveau départ où elle pourrait prendre sa place. Mais la crise d’adolescence a pris le pas sur l’espoir.

«La rage intérieure de ma jeunesse est sortie. Mes parents divorçaient juste au moment où j’avais vraiment besoin de leur aide.» Son père a gardé la maison, sa mère est partie rejoindre sa famille. Les frères et la sœur de Cindy avaient quitté le domicile familial. Elle se retrouvait seule avec son militaire à la retraite de père.

Cindy accepte un emploi dans un café pour soutenir son père financièrement. «Il ne me voyait plus comme sa fille mais comme une coloc. Très jeune, il a fallu que je prenne des responsabilités.»

Alors qu’elle doit tenir la maison, se préparer à manger, voir elle-même à ses études, la jeune fille ne connaît rien de la vie. «Je ne savais rien à propos des menstruations, des garçons.» Elle doit tout apprendre par elle-même du haut de ses 12 ans. Et ne pas montrer ses faiblesses à son père. Cindy doit devenir une adulte avant le temps.

Piercings, cigarette et alcool

Son chemin croise celui d’une autre fille qui vit la même situation. «On a commencé à fumer jeunes, à se saouler la gueule. Je faisais mes propres piercings. Parce que je venais d’une famille extrême, je faisais moi aussi des choses extrêmes!» La Cindy souffre-douleur du primaire disparaît peu à peu. À la place, une punk en crise d’adolescence partage sa vie avec une ado plus vieille que son âge qui travaille. D’un côté elle ressemblait à ses confrères de classe, de l’autre à ses collègues de travail. Une vie en deux temps.

Nouvelle passion extrême

parachute-parachutisme-avion-cours-formation-vol-saut-parachutesCindy n’échappe pas à la tradition familiale qui veut qu’à 16 ans, tous les enfants, encouragés par le paternel, sautent en parachute. Elle se découvre une passion dès sa première descente. L’ardeur qu’elle a mis dans ses cours d’autodéfense se retrouve dans les sauts qu’elle exécute toutes les fins de semaine. À 17 ans, elle devient la plus jeune à obtenir sa qualification. Elle partage son temps entre l’école, le travail et le parachute. Son père est fier. Il l’attend après chaque saut pour aller savourer une pinte de bière avec elle. «Il me traitait comme une adulte!»

Le premier amour d’adolescent

Le temps de quitter la maison approche pour Cindy. Son père se décide à vendre le domicile familial. Les deux décident de se quitter en beauté. Ils partent pour la Tunisie avec leurs sacs à dos. «On ne fêtait pas Noël, chez moi. À la place, mon père et moi on voyageait. Nous sommes  allés au Maroc, en Tunisie, on a fait le tour de l’Europe ensemble en backpack.»

Cette fois, en guise d’adieu, le père et la fille se dirigent vers le désert du Sahara. «On ne faisait pas du tourisme! Mais la dernière soirée, pour fêter la fin du voyage, on est allé dans un hôtel. Et là, j’ai rencontré mon premier vrai chum.» Le jeune garçon est un serveur tunisien. Cindy a le coup de foudre. Mais elle doit rentrer en Angleterre.

Le cœur en Tunisie

De retour chez elle, Cindy termine l’équivalent du cégep. Comme son père a vendu la maison, elle va rejoindre sa mère qu’elle a peu vu depuis cinq ans. «Ma mère n’avait pas d’opinion, elle ne prenait jamais position. Comme si rien ne la dérangeait. Moi, j’étais toujours fâchée contre elle. Je voyais qu’elle m’avait abandonnée, qu’elle ne s’était pas battue pour moi, pour me garder. C’est là que j’ai appris qu’elle avait été abusée sexuellement par son père. Je ne le savais pas. Je me suis sentie bien poche. J’ai commencée à la voir différemment.»

Cindy passait son temps entre les études, son travail dans un bar et les sauts en parachute. Son corps était en Angleterre mais son cœur se trouvait en Tunisie. Comme toujours, elle gardait ses sentiments pour elle. Personne dans sa famille ne connaissait l’existence de cet amoureux qu’elle appelait constamment. Refusée à l’université, elle quitte le pays pour retrouver l’élu de son cœur.

french-cancan-danse-cabaret-resort-tunisie-danseuses-french-cancanElle trouve un emploi au centre de villégiature où travaille son amoureux. «J’étais animatrice pour les touristes. Je donnais des cours de volley-ball et de planche à voile. Et je dansais pour les soirées cabaret. Du country pour la danse en ligne, des remake de Thriller de Michael Jackson ou de Grease.»  Cindy faisait ses premiers pas de danse, loin de s’imaginer que cette passion la ferait vivre des années plus tard.

Découvrir sa féminité

Au contact d’une des danseuses de l’hôtel, Cindy explore sa féminité. «C’était vraiment une poupée. Elle savait utiliser ses atouts. C’est elle qui m’a fait devenir femme, qui m’a appris à me maquiller, m’habiller. Je n’avais aucun style, avant. Moi, personne ne me connaissait. Je pouvais former mon image comme je le voulais. J’y ai trouvé ma confiance.» En Tunisie, la blancheur de sa peau et la blondeur de ses cheveux font tourner les têtes. Les «Cindy Doll t’es même pas belle» sont très loin. Elle se sent renaître.

Racisme et amour interdit

La jeune femme retourne une fois de plus en Angleterre après un séjour de trois mois à travailler au resort. Elle communique sans cesse avec son amoureux. Dans ses rapports avec sa famille, on la sent ailleurs, la tête dans les nuages. Elle ne peut plus cacher son secret. «Ma famille est assez raciste… Ils étaient sur mon cas quand ils ont appris que je sortais avec un Tunisien. Et moi je ne voulais pas dire la vérité: oui, il était très possessif. J’étais en amour, à 17 ans je ne voyais pas que c’était un problème.»

Sa famille, qui l’avait abandonné à son sort toute son enfance, fait pression. Elle a peur que le jour de ses 18 ans, Cindy reparte pour la Tunisie. «Ils se sont cotisés pour me donner de l’argent pour que j’aille passer cinq semaines avec ma sœur, au Québec. Ils étaient unanimes: si je retournais voir mon chum, je perdrais leur respect. C’était ma dernière chance de sauver ma relation familiale.»

Cindy préfèrerait retourner dans les bras de son Tunisien. Elle connaît peu sa grande sœur qui a quitté le foyer alors qu’elle n’avait que 10 ans. Elle est intimidée par celle qui lui envoyait des cartes postales et des cadeaux d’un peu partout dans le monde dans son enfance. Le seul lien qui les relie. Malgré tout, Cindy accepte. Sans se douter une seconde qu’elle laissera toute sa vie, et sa famille dysfonctionnelle, derrière elle pour fonder la sienne.

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