Lorsque vous avez été isolé du monde par un long séjour en prison, vous cherchez des façons de vous reconnecter à la vie que vous avez laissée derrière vous. Cette soif d’appartenance peut prendre plusieurs formes. L’une d’elles implique un jeu télévisé que je regarde depuis mon adolescence.
En grandissant dans l’enceinte d’une école où j’ai aussi été éduqué, à Westmount, je n’ai eu accès que très rarement à la langue de Molière telle qu’elle est parlée au Québec. L’école Selwyn House est aujourd’hui mieux connue pour ses professeurs que j’ai eus et qui étaient des pédophiles. On ne parle pas de la piètre qualité de son éducation.
Selwyn House
Des portraits de la Reine ornaient les murs des corridors et pas une syllabe de joual ne devait être entendue dans l’enceinte de ces couloirs marbrés. En effet, Selwyn House recrutait ses professeurs francophones partout sauf au Québec pour ne pas être contaminée par l’accent régional. Ainsi, ma classe a parlé une année un français marqué par l’accent du Yorkshire, dans le nord de l’Angleterre: «Bon-jurrr…». Puis, pendant deux ans, alors que notre professeur de français était une princesse russe, nous prononcions le subjonctif avec un chuintement guttural.
Plus tard, nous sommes tombés entre les mains d’un professeur venant de Lyon qui, dès son premier jour, nous a dit que dans la Rome antique, les esclaves faisaient office de professeurs pour les enfants fortunés et qu’il n’avait pas l’intention de s’abaisser à être traité comme un auxiliaire embauché pour servir une bande de gosses gâtés.
Des chiffres et des lettres
Bientôt, nous nous sommes mis à parler comme de petits bouquinistes des bords de Seine en cravate rayée jaune et blanche. On nous a demandé d’éviter d’écouter les émissions télévisées dans lesquelles les gens du coin parlaient un mauvais français québécois populaire. Quand la télévision câblée nous a finalement relayé «Des chiffres et des lettres», on nous a toutefois dit qu’il était acceptable de la regarder. Ce que j’ai fait. J’ai participé au jeu dans ma tête, et j’ai constaté avec fierté qu’un ti-gars tête carrée comme moi pouvait égaler ou même surpasser les candidats en parvenant à extraire un mot français à la fois étrange et exotique des neufs lettres tirées au hasard et disposées sur une étagère étroite.
J’ai regardé cette émission longtemps après avoir quitté Selwyn House. Je la regardais l’été que j’ai passé en Champagne, envoyé là-bas pour renforcer mes adorables «r» roulés et échapper au péril que représentait le français de Robert Charlebois. Je l’ai regardée lorsque j’étais à McGill.
Au cours de mon emprisonnement à vie, voilà qu’apparaît sur le câble télévisé de la prison, courtoisie de TV5, ce que j’ai reconnu comme un souvenir de jours meilleurs et libres. Une chose à laquelle me raccrocher, une demi-heure pendant laquelle je pouvais faire ce que je faisais jadis, avant de devenir un numéro. Je la regarde aussi souvent que possible depuis la saleté et l’isolement de ma prison.
Chaque jour, les animateurs présentent deux «duels», des casse-têtes envoyés par des auditeurs. Un jour, j’ai envoyé mon propre casse-tête. J’ai écrit que j’étais un «condamné à vie» emprisonné dans un pénitencier canadien et que je regardais leur émission tous les jours.
Environ un mois plus tard, pendant le premier des deux duels du jour, un des juges de l’émission a fixé ses pieds, presque honteux : «Vous savez, il y a des gens dans les prisons qui nous regardent tous les jours. Des moins chanceux que nous.» La co-animatrice a esquissé un sourire charitable. «Oui, a-t-elle dit, C’est vraiment très triste. Nous pensons souvent à eux. Nous recevons souvent du courrier de détenus à travers le monde. On ne leur souhaite que le meilleur», a-t-elle ajouté en secouant la tête.
Je ne suis pas mort!
Ils avaient l’air attristés, comme s’ils venaient d’apprendre la mort d’un des leurs ou une tragédie semblable. Je me suis adressé au téléviseur, souhaitant presque attirer leur attention: «Mais je ne suis pas mort», ai-je dit. «Je suis juste ici et je vous regarde tous les jours.» Jamais mon isolement ne m’a paru aussi total.
Le lendemain, ils ont utilisé mon idée. Mon nom n’a pas été mentionné. Je regarde toujours l’émission les soirs de semaine, lorsque la journée de travail à l’usine de la prison est terminée. Je n’ai jamais envoyé d’autres suggestions. De nos jours, elles arrivent toutes par courriel de toute façon et les détenus n’ont pas accès à Internet.
Les livres de Colin McGregor
Journaliste dans divers médias à travers le pays; Halifax Daily News, Montreal Daily News, Financial Post et rédacteur en chef du Montreal Downtowner. Aujourd’hui, chroniqueur à Reflet de Société, critique littéraire à l’Anglican Montreal, traducteur et auteur aux Éditions TNT et rédacteur en chef du magazine The Social Eyes.
Parmi ses célèbres articles, il y eut celui dénonçant l’inconstitutionnalité de la loi anti-prostitution de Nouvelle-Écosse en 1986 et qui amena le gouvernement à faire marche arrière. Ou encore en Nouvelle-Écosse, l’utilisation répétée des mêmes cercueils par les services funéraires; scoop qui le propulsa sur la scène nationale des journalistes canadiens.
Enjoy our tale of the quest, the human thirst, to find light from within the darkness.
This is a tale for everyone, young and old, prisoner and free.
Love in 3D. Une traduction de L’Amour en 3 Dimensions.
Three teenage friends on a college rugby team in the shrinking community of English Montreal – three friends each facing wildly different fates.
This is the story of Bill Putnam, whose downward trajectory we first begin to trace in the late 1970s, and his friends Rudy and Max.
Teammates, their paths will cross in ways they never dreamt of in the happier days of their youth.
Le suicide dérange. Le suicide touche trop de gens. Comment définir le suicide? Quel est l’ampleur du suicide? Quels sont les éléments déclencheurs du suicide? Quels sont les signes avant-coureurs? Comment intervenir auprès d’une personne suicidaire? Comment survivre au suicide d’un proche?…
Ce guide est écrit avec simplicité pour que tout le monde puisse s’y retrouver et démystifier ce fléau social. En français. En anglais.
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Jacques Parizeau et le Journal de Montréal, aberration totale
Le sensationnalisme du Journal de Montréal
Le décès de Jacques Parizeau
Raymond Viger Dossiers Médias, Politique, Francophonie, Journal de Montreal
Mes sympathies aussi à tous les Québécois qui sont ébranlés par le départ de Jacques Parizeau.
La très grande majorité des médias et beaucoup de réseaux sociaux ont rapidement commenté cette nouvelle.
Ma conjointe a été très surprise de voir un grand dossier dans La Presse sur la vie de Jacques Parizeau mais absolument rien dans le Journal de Montréal.
Manque de temps? Manque de journalistes? Peur qu’on accuse le Journal de Montréal d’être en conflit d’intérêt avec le propriétaire Pierre Karl Péladeau qui fait parti du Parti Québécois tout comme Jacques Parizeau?
Ce qui m’a choqué de la part du Journal de Montréal aura été le traitement de la nouvelle le lendemain:
Le sujet méritait d’être couvert. Jacques Parizeau a été le sujet de nombreux commentaires disgracieux de la part d’anglophones. La nouvelle s’arrêtait là. Copier – coller ces commentaires pour les publier était-il pertinent? Est-ce que de publier les imbécilités de certains internautes est un journalisme digne de ce nom?
Un article qui n’est pas signé. C’est vrai qu’être journaliste ça doit être gênant de signer un article qui se contente de copier – coller ce que l’on retrouve dans les réseaux sociaux.
Possiblement que pour le référencement dans les moteurs de recherche ce genre d’article qui copient à l’infini le nom de Jacques Parizeau doit être payant.
Il fût un temps où le sensationnalisme servait à vendre de la copie. Maintenant le sensationnalisme sert à gagner des points Google de référencement.
Le genre d’exemple où les nouveaux moyens de communication n’aident pas notre société à être mieux branché.
Mes sympathies à tous pour cette navrante conclusion, spécialement à la famille et aux proches qui pourraient être blessé par le traitement que le Journal de Montréal a fait ici.
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