Le parcours d’un joueur compulsif
Pour jouer aux machines à sous, Ali a renié toutes ses valeurs. Il a volé sa famille, un employeur et s’est trouvé coupable de complicité de vol. Aujourd’hui sans le sou, il cherche à panser des blessures refoulées depuis l’enfance alors qu’il a été élevé dans la violence.
Dominic Desmarais | Dossier Gambling et jeu compulsif
C’est lors d’un passage au centre Dollar-Cormier, où il suit une thérapie, qu’Ali est écouté. Un intervenant saisit toute la rage qui l’anime. «Il m’a fortement conseillé d’aller à la maison Jean-Lapointe parce que je ne pouvais plus vivre avec cette rage en moi. C’était devenu la seule façon que j’avais pour m’exprimer. J’étais rendu à détester ma famille pour ce que j’étais devenu, pour la façon dont j’avais été élevé, par la violence.»
Face à son bourreau
Les deux premières semaines à la maison Jean-Lapointe sont dures mentalement et physiquement pour le jeune joueur compulsif. Après 14 jours, il ne comprenait toujours pas ce qu’il faisait là. «J’ai demandé à voir le psychologue. Au début, ça m’a déçu de parler pendant une heure sans qu’il ne dise un mot. J’ai beaucoup pleuré. Et grâce à son rapport, les intervenants ont su comment m’aborder. Avant, ils me demandaient d’écrire. Mais toute ma vie, on m’a forcé à écrire. J’ai été battu pour ça. Je n’arrivais pas à écrire. Alors avec les intervenants, on l’a fait verbalement.» Ali est secoué lorsqu’on lui fait réaliser qu’il a 50 ans à vivre encore. «J’ai décroché de mon boulet.» Le boulet d’Ali, c’est la violence dont il a été victime en tant que dernier de la famille. Le traumatisme causé par le passage à tabac que son grand frère lui a fait subir à leur arrivée à Montréal, quand il avait 14 ans. Et l’aveuglement volontaire des membres de sa famille à qui il en veut.
Ali veut tourner la page sur son passé. Il prend l’initiative de convoquer son bourreau pour une explication. Mais son grand frère se dérobe. La conversation a lieu au téléphone. «Je lui ai demandé de me rencontrer face-à-face pour m’expliquer pourquoi il m’avait battu. Il n’en a pas été capable. Il avait oublié qu’il m’avait torturé et enfermé pendant un mois. 1990, pour lui, ça remonte à loin. Ce n’est pas lui, la victime.
Moi, j’ai fait ça? Si tu ne me pardonnes pas, égorge-moi alors. C’est ce qu’il m’a répondu. Tout est facile pour lui. Déjà, j’avais de la haine envers lui. En 2005, aux fêtes, j’avais envie de lui sauter dessus, de lui péter la gueule, en lui demandant c’était quoi, ton idée? J’allais t’apprendre la discipline, qu’il m’a répondu en riant avant de rajouter en m’insultant: sans rancune.»
Ali n’a pas réglé tous ses problèmes. Il est encore morcelé par le mal qui le rongeait depuis si longtemps. «La journée où mon frère m’a battu, à 14 ans, j’ai prié le bon Dieu pour qu’il n’ait jamais d’enfants car il les aurait massacrés. Son épouse à été enceinte 3 fois. Ses enfants sont tous morts à la naissance. Est-ce que c’est moi qui les ai tués, par ma prière», se demande-t-il mal à l’aise. «Il m’a ramené ça en me disant que j’avais fait une belle prière pour lui… À la Maison Jean-Lapointe, j’ai appris à pardonner. Pas à oublier. Mais mon frère, je ne peux pas dire que je lui ai pardonné. C’est sa frustration à lui, cette journée-là, qu’il a refoulée sur le plus jeune.» Ali n’a pas encore vidé son fiel contre ses frères qui l’ont élevé à coups de poings et de pieds. «Mon autre frère, il est boxeur. Un matin, il ne voulait pas aller chercher le journal. Moi, je dormais. Il m’a réveillé à coups de poings. J’étais en sang. Juste pour aller lui chercher son journal. C’est comme ça que j’ai été élevé. Le punching bag de la famille», dit-il avec frustration.
Les jeux sont faits
Ali n’a pas cessé de jouer. Il a diminué ses fréquences de jeu. Il ne travaille pas, son estime s’en ressent fortement. «Des fois, je me sens bon à rien. Je deviens négatif. Ce n’est pas bon. Je sais que je peux faire tellement de choses. J’ai beaucoup de qualités que je pourrais utiliser. Mais en même temps, je me sens comme une merde. Je sais bien qu’il ne faut pas prendre la vie comme un combat. Mais à tous les jours c’en est un pour moi juste pour survivre. Une chance que j’ai ma famille. Bien que ma mère ait fermé les yeux sur les corrections dont j’ai été victimes à la maison, elle veut se reprendre. Elle se sent mal de la manière dont elle m’a élevé. Mais je ne peux pas lui en vouloir. Moi, j’en veux à mes frères. Un grand frère, c’est censé te protéger, pas t’écraser comme un mégot de cigarette.»
Ressources pour le jeu compulsif
- Gamblers Anonymes et Gam-Anon (514) 484-6664 ou 1-800-484-6664
- Narcotiques Anonymes (514) 249-0555 ou 1-800-463-0162
- Nar-Anon (514) 725-9284
- Alcooliques Anonymes (514) 376-9230
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Guide d’intervention de crise auprès de personnes suicidaires
Le guide d’intervention auprès de personnes suicidaires démystifie le suicide. Il permet d’aider les proches à reconnaître les signes avant-coureur du suicide et de déterminer qu’est-ce qui peut être fait pour soutenir la personne en crise.
Une section du guide est réservée aux endeuillés par suicide.
Le livre est disponible au coût de 4,95$.
Par téléphone: (514) 256-9000, en région: 1-877-256-9009
Par Internet: http://www.editionstnt.com/Livres.html
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Itinérance et toxicomanie
Rencontre avec l’itinérance
Jean-Simon Brisebois | Dossiers Santé mentale, Toxicomanie et Itinérance
Samir est un jeune polytoxicomane qui a connu l’itinérance. J’ai fait sa rencontre dans un atelier de poésie au centre de jour Spectre de rue. Samir est probablement un des participants qui s’implique le plus dans les ateliers. Pour ma part, je suis sensible à cette triste réalité qui aurait pu me toucher.
Jean-Simon Brisebois, auteur de poésie urbaine
JS: Depuis combien d’années vis-tu l’itinérance?
Samir: Depuis 5 ans et demi.
JS: Qu’est-ce qui t’a amené à devenir itinérant?
Samir: Le goût de l’aventure, de voir ce que c’est vivre de l’itinérance.
JS: Qu’est-ce qui t’as amené à y rester?
Samir: La drogue, elle m’a amené à m’évader, elle m’amène un certain plaisir qui me donne de l’euphorie, ce qui me pousse à consommer de plus en plus pour oublier ma misère et mon itinérance.
JS: D’où provient cette misère?
Samir: Ma misère part de mon enfance blessée. Elle me donne de la difficulté pour trouver un travail, un logis. Mais en moi, il y a un grand espoir de m’en sortir.
JS: Quels sont les moyens que tu prends pour t’en sortir?
Samir: Au départ, pour me venir en aide, j’ai fait appel à des intervenants du Centre Dollar-Cormier qui m’aident à comprendre ce qui m’amène à consommer. De plus, je fréquente les ressources du centre de jour de Spectre de rue qui me permettent de me reposer. Ils me confrontent sur mes problèmes de drogues (crack et pot) pour m’aider à m’en sortir.
JS: Quel est le message que tu veux faire passer aux jeunes grâce à ce témoignage?
Samir: Ils ne doivent pas se laisser influencer par les gens qui voudraient les amener pour une raison à consommer des drogues. Ils doivent dire non aux drogues. Il faut suivre le bon chemin de la vie, parce que vivre de l’itinérance n’est pas rose.
Livres de Jean-Simon Brisebois
Autres textes sur Itinérance
Guide d’intervention de crise auprès de personnes suicidaires
Une section du guide est réservée aux endeuillés par suicide.
Le livre est disponible au coût de 4,95$. Par téléphone: (514) 256-9000, en région: 1-877-256-9009. Par Internet.
Par la poste: Reflet de Société 4233 Ste-Catherine Est Montréal, Qc. H1V 1X4.
Maintenant disponible en anglais: Quebec Suicide Prevention Handbook.
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