Savez-vous qu’en français moderne, le français que l’on parle aujourd’hui, il y a une lettre de l’alphabet qui ne correspond à aucun son ou presque? C’est le h, huitième lettre de l’alphabet, que l’on dit muet ou aspiré. Dans le cas du h aspiré, on devrait en fait parler de h expiré parce que sa prononciation entraîne une légère expiration d’air, et non une aspiration, qui serait d’ailleurs assez difficile à réaliser en parlant. Je vous mets au défi de prononcer trois fois haricot en inspirant par la bouche, vous allez voir que ce n’est pas si facile!

Un texte de Aude Charrin publié sur Reflet de Société – Dossier Éducation

La lettre h était déjà présente dans l’alphabet latin et elle était prononcée de la même manière que le h anglais aujourd’hui, par exemple dans les mots howhope, ou hi, donc avec une expiration très marquée. Aujourd’hui, même si l’expiration n’a pas tout à fait disparu, notamment quand on dit hop! ou ha!, elle a quand même perdu beaucoup d’intensité.

Mais alors, pourquoi les «h» sont-ils présents s’ils ne servent pas à grand-chose à part à expirer avant de prononcer deux ou trois mots de notre langue?

Au 14ᶿ siècle, les moines copistes et les scribes, qui étaient chargés de recopier les textes à la main avant l’invention de l’imprimerie, ont eu tendance à insérer dans les mots une lettre, généralement une consonne, qui ne correspondait à aucun son prononcé, mais dont la présence rappelait la racine grecque ou latine de ce mot, une origine très respectable pour une langue qui se voulait prestigieuse. C’est à cette époque qu’est apparue la lettre h au début de mots comme honneur, homme, habit, heure, habitude et bien d’autres, une lettre appelée « lettre étymologique » parce qu’elle révélait l’origine, l’histoire du mot. Mais dans certains cas, cette consonne n’avait absolument rien d’étymologique, au contraire, elle trahissait la connaissance très approximative du latin ou du grec chez nos scribes. C’est le cas notamment du mot arithmétique dont l’origine est bien grecque mais qui a toujours été écrit, même par les Grecs, sans le h, ou du mot huile dont le h initial ne figurait pas à la racine latine. Mais alors pourquoi rajouter des lettres alors qu’ils devaient déjà copier un manuscrit gros comme un dictionnaire? Eh bien, figurez-vous que nos chers scribes étaient payés à la ligne; et le fait d’ajouter une lettre à un mot leur permettait d’atteindre plus rapidement la fin d’une ligne. Certains n’ont donc pas hésité à rallonger des mots pour être mieux payés. Autrement dit, le h a parfois été ajouté aux mots de la langue française de façon complétement fautive, n’ayant rien à voir avec une étymologie grecque ou latine, mais plutôt avec un sens douteux des affaires. Et dire que dans les dictées, les fautes d’orthographe peuvent coûter très cher… La prochaine fois que vous croisez un h, vérifiez donc la racine du mot, et vous saurez s’il est justifié par l’histoire ou s’il a servi à enrichir des générations de copistes…

27 capsules sur les difficultés de la langue française sont présentées par l’humoriste Fred Dubé.

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