Un texte de Virginie Francoeur,  Ph. D. publié sur Reflet de Société | Dossier Environnement et Économie

À l’échelle planétaire, la santé et la subsistance des populations reposent étroitement sur la viabilité des écosystèmes. L’ère de la mondialisation a entraîné une fragilisation de l’environnement naturel. Les comportements écoresponsables de chacun sont peut-être la solution.

Les causes les plus importantes de cette dégradation sont de nature anthropique, c’est-à-dire qu’elles sont provoquées par les humains. Les recherches sur le comportement des humains et leurs activités deviennent incontournables dans un contexte de surexploitation des ressources naturelles, d’augmentation de la pollution atmosphérique et d’évolution de l’empreinte carbone. 

L’activité humaine s’est grandement intensifiée et diversifiée au fil de l’évolution des civilisations au point où ses conséquences dépassent la capacité planétaire. Au cours des cinquante dernières années, ces activités ont endommagé de manière irréversible les écosystèmes et ont causé plus d’impacts négatifs sur ceux-ci qu’à toute autre période de l’histoire.

Le dernier rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat mentionne d’ailleurs que les activités humaines provoquent le réchauffement climatique qui cause « des changements rapides dans l’atmosphère, les océans, la cryosphère et la biosphère ». L’influence des activités humaines sur la dégradation de l’environnement est désormais une réalité bien établie. 

Crises majeures

L’Organisation des Nations Unies prévoit une importante croissance de la population mondiale au cours de la prochaine décennie. En 2030, elle atteindrait 8,5 milliards d’individus contre 7,6 milliards en 2020. Une hausse d’un milliard d’habitants induit une augmentation mécanique des besoins avec toutes les contraintes environnementales que cela entraîne.

Les questions environnementales constituent un enjeu crucial pour la pérennité de nos sociétés et la survie de l’humanité. La pandémie de COVID-19 illustre un exemple de crise majeure qui engendre des transformations importantes aux niveaux social, environnemental, économique, technologique et organisationnel. 

Malgré ses implications dramatiques, on a constaté, à la suite de l’arrêt brutal d’une large part des activités économiques sur une période de plusieurs mois, une baisse significative des émissions de gaz à effet de serre. 

Bien que cet arrêt n’ait finalement produit qu’un ralentissement de ces émissions, et non une réduction de leur concentration dans l’atmosphère, on a observé un net recul de la pollution atmosphérique produite par le dioxyde d’azote (NO2)1. Le dioxyde d’azote émane de l’utilisation de combustibles fossiles, et constitue un des principaux marqueurs du mode de vie moderne.

Ces observations ont eu pour effet de susciter certaines lueurs d’espoir de la part des environnementalistes qui prônent depuis des années un changement durable de nos habitudes.

Sur l’ensemble des enseignements qu’il est possible de tirer de cet épisode pandémique, celui de la minimisation des dégradations environnementales par une modification des habitudes comportementales est une voie prometteuse pour renouer avec un mode de vie écologiquement viable et pérenne.   

L’écologie au travail

D’importants progrès ont été réalisés, ces dernières années, grâce à l’étude des comportements écologiques dans les milieux de travail. Il est intéressant de noter, en se basant sur des statistiques gouvernementales, que l’impact du secteur non domestique (par exemple, les services, le secteur public et l’industrie) est nettement plus élevé que celui du secteur résidentiel2.

Paradoxalement, le secteur non domestique, comme terrain d’investigation, continue d’être largement négligé en comparaison des milieux résidentiels. La pertinence d’étudier les milieux de travail s’explique par les obstacles à l’adoption de pratiques écoresponsables qui ne sont pas les mêmes au sein de ces milieux et de ceux résidentiels, ce qui pose ainsi des défis supplémentaires importants. 

La recherche a établi, depuis de nombreuses années, que les individus sont susceptibles d’agir différemment en fonction des contextes dans lesquels ils se trouvent. Les explications communément admises se rapportent notamment à des raisons économiques. Par exemple, en milieu de travail, la facture énergétique est généralement acquittée par l’employeur et non par les employés qui, pour leur part, peuvent adopter une conduite plus frugale dans le secteur domestique.

La recherche a aussi montré qu’il ne suffit pas de mettre en place des pratiques organisationnelles pour inciter les employés à s’engager dans l’écologisation. En effet, si les politiques et pratiques de gestion environnementale sont une condition nécessaire à l’instauration d’un contexte de travail tendant vers la viabilité écologique, elles ne sont pas suffisantes en elles-mêmes pour induire les comportements recherchés chez les employés. Autrement dit, la présence d’une pratique environnementale n’entraîne pas systématiquement l’adhésion des individus ni un changement de leurs habitudes dans leur cadre de travail.

Mobilisons-nous

La participation et la mobilisation d’une majorité d’employés sont alors cruciales, ceux-ci étant en première ligne. La mise à profit de leur savoir est essentielle dans l’utilisation adéquate des ressources afin de préserver les écosystèmes. Les superviseurs, garants de la qualité de vie au travail, ont aussi un rôle important à jouer en termes de soutien, de formation et de sensibilisation en matière de gestion environnementale.

Les récentes études qui s’inscrivent dans cette perspective comportementale s’efforcent de mettre l’accent sur les comportements individuels, notamment sur l’engagement volontaire des employés dans l’adoption d’actions pouvant améliorer le sort de l’environnement3. La nécessité de miser sur ces pratiques provient du fait qu’ils représentent aujourd’hui un impératif stratégique incontournable pour assurer la légitimité sociale des organisations, réduire les coûts liés aux impacts environnementaux et répondre aux nouvelles attentes des citoyens. 

L’importance d’agir dans les milieux organisationnels s’explique aussi par le fait que la majeure partie de notre vie active se déroule au travail. Nous travaillerons près de 100 000 heures au courant de notre vie. Les organisations doivent donc faire partie de la solution. Par ailleurs, certaines sont tentées d’adopter un discours environnemental basé uniquement sur des stratégies de marketing, et ce, afin de redorer leur image de marque, sans réellement se soucier du bien-être de l’environnement.

Pour inverser cette tendance, il est urgent de se demander quels sont les obstacles et les leviers de changement pour une transition écologique dans les milieux de travail. Comment peut-on soutenir les employés dans l’adoption de comportements écoresponsables? 

  1. Consultez l’article : Kumari, P., & Toshniwal, D. (2020). Impact of lockdown on air quality over major cities across the globe during COVID-19 pandemic. Urban Climate34, 100719.
  2. Consultez l’article : Davis, M. C., & Challenger, R. (2009). Climate change–Warming to the task. Psychologist, 22(2), 112–114.
  3. Consultez l’article :  Francoeur, V., Paillé, P., Yuriev, A., & Boiral, O. (2021). The Measurement of Green Workplace Behaviors : A Systematic Review. Organization & Environment, 34(1), 18–42.

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